CRIMS
Collectif de Réflexion sur l'Inceste et les Maltraitances Systémiques
29 aoƻt 2024
Mise à jour :
INCESTE
Nos incestes qui nāexistent pas
Je vais parler dāun sujet qui nāexiste pas, dāun, des incestes qui nāexistent pas, ils existent bien sĆ»r, mais pas vraiment, nous sommes ces passĆ©s dĆ©classĆ©s, cet Ć©lĆ©phant flou dans la piĆØce que lāon prĆ©fĆØre contourner, nous sommes les victimes dāun dāinceste de Schrƶdinger, Ć la fois inceste et Ā« peut-on vraiment appeler cela de lāinceste ?Ā».
Nous, nos traumas enchainĆ©s, nous nāexistons pas, nos histoires nāexistent pas, la sociĆ©tĆ© vaporise nos paroles et sublime nos existences.
Je ne vais pas utiliser cette expression rebattue Ā« nous parlons et nous ne sommes pas entendu Ā», parce quāen fait je pense que cāest pire.
Nous parlons dans le vide, nos voix ne font vibrer aucun air, nos paroles sāĆ©vaporent dans lāĆ©ther avant mĆŖme dāavoir touchĆ© quoi ou qui que ce soit.
Je vais donc parler de lāinceste, dans les fratries, entre cousins, de lāinceste entre enfants, de cet inceste qui nāexiste pas.
Et je dis bien de lāinceste Ā« entre enfants Ā» et pas Ā« entre mineurs Ā».
Je nāaime pas les qualifications juridiques, je ne māen suis jamais cachĆ©e, elles ont cette fĆ¢cheuse tendance Ć classer Ć lāexcĆØs et Ć figer la rĆ©flexion.
On ne parle plus Ā« dāenfants Ā», on parle de Ā« mineurs Ā» et cāest bien pratique cela Ā« mineurs Ā», puisque cela va de 0 Ć 18 ans, bon ok je vous accorde le Ā« mineur de moins de 15 ans Ā» qui existe pour bien appuyer la gravitĆ© (avec les gros yeux et tout).
Bref
Je nāaime pas ce remplacement de Ā« enfant Ā» Ā« adolescent Ā» par ce grand fourre-tout de Ā« mineur Ā»
En gĆ©nĆ©ral, nous dirons, Ā« la plupart du temps ā souvent ā trĆØs souvent Ā» parler dāinceste entre mineurs, fait Ć©merger la figure de lāadolescent qui abuse sa petite sÅur (si possible trĆØs petite), on aime bien les diffĆ©rences dāĆ¢ge lorsque lāon parle dāinceste, cela maximise les effets vous voyez.
Ce que jāai remarquĆ© quand les gens parlent dāinceste, les gens, les journalistes, les pas journalistes, cāest de maximiser lāhorreur, et hiĆ©rarchiser, ah la la oui alors, la sociĆ©tĆ©, la justice (cāest son travail en quelque sorte) adorent, hiĆ©rarchiser.
Agressions sexuelles moins grave que viol, lāon ne sait pas tellement sur quels critĆØres de gravitĆ© tout cela repose et surtout pour qui, MAIS cāest plus ou moins grave.
Et par une opĆ©ration quasi magique, la diffĆ©rence dāĆ¢ge maximise aussi, pardon pour ces paroles un peu crues qui arrivent, lāĆ¢ge mais aussi la taille du sexe qui agresse amplifie aussi la gravitĆ©, de quoi on ne sait pas trop, pour qui on ne sait pas tellement non plus.
Mais apparemment, une main/un sexe dāadulte qui agresse, cāest plus traumatisant quāune main/un sexe dāadolescent, qui est plus traumatisant quāune main/un sexe Ā tut tut tut Ā les agressions Ā« entre enfants Ā» (regard interloquĆ©, main sur le cÅur, psychĆ© Ć la dĆ©rive) Ƨa . nāexiste . pas.
Ok, ok
Donc lāinceste dans les fratries ou entre cousins, cela glisse trĆØs rapidement vers cette figure Ā« traumatiquement acceptable Ā» dāun "mineur" vraiment plus grand qui agresse une ou un "mineur" vraiment plus petit.
Parce que ce type dāinceste est socialement beaucoup mieux acceptĆ© dans lāimaginaire collectif que des enfants qui en agressent dāautres, avec une diffĆ©rence dāĆ¢ge peu Ć©levĆ©e et surtout, surtout un Ć¢ge de lāagresseur acceptable socialement : parce que les enfants sont pures et angĆ©liques et ne pensent pas au sexe bien Ć©videmment.Ā
Pour en arriver Ć cela il faut bien sĆ»r Ć©vacuer toutes les dynamiques incestuelles prĆ©existantes (dynamiques qui font que des enfants incestent leurs frĆØres et/ou leurs sÅurs) mais bon, on est plus Ć Ć§a prĆØs et les incestes se rĆ©duisent, rĆ©duisent, rĆ©duisent Ć une toute petite peau de chagrin Ć peine assez grande pour essuyer nos larmes.
Et ce nāest malheureusement mĆŖme pas le rapport CIIVISE qui me donnera tord puisque sur un rapport de 750 PAGES, nous avons donc UNE DEMI-page consacrĆ©e Ć cet Ā« Ć©piphĆ©nomĆØne Ā» visiblement, de lāinceste dans les fratries :
Citation rapport CIIVISE, p 269-270 [1] :
3.2.3. Inceste fraternel
Le frĆØre fait partie des agresseurs les plus frĆ©quents, il est mĆŖme le premier agresseur des garƧons (dans 26% des cas de violences commises contre des garƧons), avant le pĆØre (24%).
Dans les cas dāinceste, il est frĆ©quent que les adultes rĆ©duisent les violences sexuelles entre mineurs Ć des Ā« jeux sexuels Ā» ce qui contribue Ć minimiser, banaliser ces violences et enjoindre les victimes au silence.
DorothĆ©e Dussy explique, en effet, que si lāĆ©cart dāĆ¢ge entre le mineur agresseur et le mineur victime est faible, les psychiatres vont davantage qualifier les actes de jeux sexuels. Ceci sāexplique par le fait quāil est gĆ©nĆ©ralement estimĆ© quāon ne peut parler de violences sexuelles quāĆ partir du moment oĆ¹ lāĆ©cart dāĆ¢ge est de cinq ans. Cāest, dāailleurs la mĆŖme logique qui a Ć©tĆ© retenue pour lāadoption de la clause dite RomĆ©o et Juliette dans la loi du 21 avril 2021. Il demeure que cette croyance contribue Ć la minimisation et Ć la banalisation des violences sexuelles entre mineurs.
DorothĆ©e Dussy formule lāhypothĆØse selon laquelle le frĆØre agresseur, ayant lui-mĆŖme Ć©tĆ© victime, initierait ce quāil pense ĆŖtre un rapport sexuel parce quāil cherche de nouvelles stimulations sexuelles et/ou parce quāil veut explorer la position de celui qui agit, ce qui revient donc Ć ĆŖtre celui qui agresse.
La reproduction des violences subies peut, en effet, ĆŖtre une consĆ©quence des violences sexuelles et un symptĆ“me du psychotraumatisme. Le DSM-5 pose quāun enfant ayant Ć©tĆ© exposĆ© Ć des violences sexuelles est susceptible de prĆ©senter des symptĆ“mes dāenvahissement des scĆØnes traumatiques. Cela peut se traduire, entre autres, par des reproductions des violences ou de certains de leurs aspects exprimant des thĆØmes ou des aspects du traumatisme.
Bien que souffrant dāun stress post-traumatique, il demeure cependant que le frĆØre agresseur est en capacitĆ© de comprendre quāil est en train de commettre un acte de violence.
Il semble aussi que lāinceste soit une faƧon, pour lāagresseur de faire payer Ć son frĆØre ou sÅur cadet lāaffection, la disponibilitĆ© ou lāattention dont il est objet de la part de ses parents ou quāil croit que ses parents accordent au cadet ou Ć la cadette.
VoilĆ , dĆ©brouillez-vous avec cela, et si vous ne vous y retrouvez pas, dĆ©brouillez-vous quand mĆŖme avec cela, parce que cāest tout ce Ć quoi vous avez droit.
Je vous rƩsume :
Lāinceste dans les fratries Ƨa existe (il y a des chiffres et tout, assez important du reste) cāest minimisĆ© (cāaurait Ć©tĆ© difficile de dire le contraire quand on dĆ©montre quāon le fait soi-mĆŖme), il Ā« semble Ā» quāil y a des causes, on ne sait pas trop, on nāa pas trop Ć©tudiĆ© notre sujet, donc on vous les livre en vrac, voilĆ bonne soirĆ©e et bisous Ć la famille, ah merde non, bon bah bisou tout court.
Je pense que je ne pardonnerai jamais.
Avoir eu une telle opportunitĆ© de balayer le champ des incestes pendant 3 longues annĆ©es, pour finir par pondre une demi-page mal fagotĆ©e sur lāinceste fraternel, je ne pardonne pas, mes adelphes victimes elles aussi dāinceste dans leur fratrie ont du mal Ć pardonner.
CiIvise Commission indĆ©pendante sur lāINCESTE, mais pas tous les incestesā¦
A suivreā¦
(oui parce quāil est, ouh la 2h du matin, et que le reste nāest pas encore Ć©crit, mais Ƨa arrive)
ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā ā
Bref parlons de lāincestuel dans nos familles qui ameĢne aĢ des actes dāinceste dans nos fratries.
De nos difficulteĢs aĢ en parler, aĢ sāidentifier, aĢ se reconnaitre.
Il y a des actes dāinceste, entre enfants, dans les fratries, parmi les cousins. Cāest un fait, les chiffres ne sont pas bien clairs sur le sujet, et il est assez simple de savoir pourquoi, en parti parce que nous en parlons tard ou nous nāen parlons pas. Nos parents qui savent (oui parce que nos parents savent) ne parlent pas, lāentourage qui sait, qui soupcĢ§onne, qui entrevoit et /ou qui se doute, ne parle pas.
Pour une raison que jāignore (aĢ moitieĢ, jāai quelques doutes, quelques suppositions), lāinceste dans les fratries, mais encore plus entre enfants ā allez situons les aĢges sinon, on ne va pas sāen sortir, enfant entre 7 et 13 ans, je parle ici de lāaĢge des agresseurs ā met tout le monde mal aĢ lāaise.
Les familles, les journalistes, les soignants, la justice, les associations de victimes, les militantĀ·es, les feĢministes, bref tout le monde.
Lāinceste entre enfants deĢrange car il remet en question beaucoup trop de croyances, beaucoup trop de preĢjugeĢs et dāimages preĢconcĢ§ues de lāinceste.
Il bouscule les imaginaires et impose une reĢaliteĢ impensable donc impenseĢe.
Il contrevient aĢ tous les discours sur lāinceste qui ont eĢteĢ porteĢs jusque-laĢ.
Nous avons un storytelling treĢs preĢsent, qui bien suĢr a toujours existeĢ, mais qui est le plus ressorti suite aĢ lāaffaire Duhamel et suite aĢ la CIIVISE version I : cāest que lāinceste serait le fait dāun peĢre/beau-peĢre, une figure dāautoriteĢ adulte sur un enfant. Cette figure serait la seule responsable et reĢussirait aĢ pervertir la famille dāabord et ensuite les institutions et la socieĢteĢ.
Cāest joli, et cāest treĢs rassurant, cāest treĢs rassurant parce que si lāon arrive aĢ eĢcarter ce seul responsable, aĢ le punir et aĢ lāemprisonner alors tout redevient Ā« normal Ā», la socieĢteĢ est alors proteĢgeĢe des monstres quāelle nourrit.
Or, dans lāinceste adelphique, celui qui agresse nāest pas cette figure adulte dāautoriteĢ, nous y reviendrons.
Il faudrait donc imaginer plutoĢt une dichotomie entre incesteur : qui insuffle ce climat incestuel dans la famille, et lāagresseur : qui commet les actes dāinceste, incesteur qui peut bien eĢvidemment eĢtre aussi lāagresseur.
Une cellule familiale (famille nucleĢaire) ne peut eĢtre consideĢreĢe hors contexte, cāest-aĢ-dire quāelle-meĢme sāinclue dans une autre histoire familiale incestuelle plus vaste, souvent transgeĢneĢrationnelle et parfois meĢme double, lāinceste se trouvant du coĢteĢ paternel et maternel. Or cāest un peu contradictoire avec ce qui en est preĢsenteĢ la plupart du temps, comme sāil y avait des geĢneĢrations spontaneĢes dāinceste, un Ā« peĢre Ā» sorti du neĢant qui se met aĢ fabriquer de lāinceste, et pire encore, un enfant qui se met aĢ fabriquer de lāinceste dans sa fratrie en dehors de tout contexte et toute dynamique familiale preĢexistante.
Je lāai deĢjaĢ eĢvoqueĢ, lāincestuel dans une famille preĢceĢde et permet lāinceste en acte, et cāest dāautant plus visible, clair, identifiable quand les actes dāinceste se deĢroulent dans la fratrie, et SURTOUT quand il sāagit dāinceste entre enfants, aĢ part imaginer que lāon puisse naitre incestueux.
Or je pense que lāon ne nait pas incestueux, on nait puis on est eĢleveĢ dans un climat incestuel et on peut le devenir. (point important : il faut cesser de reĢpandre ces preĢjugeĢs sur les victimes dāinceste ou de maltraitance, on PEUT le devenir, mais la majoriteĢ des victimes ne reproduisent pas ce quāelles ont subi).
Donc dire, Ā« un enfant reproduit ce quāil a vu ou ce quāon lui a fait Ā» oui cela arrive, mais cāest treĢs reĢducteur, car beaucoup dāenfants vivent de lāinceste et ne le reproduisent majoritairement pas sur leur freĢres et sÅurs, tout comme il y a des enfants qui nāont pas veĢcu dāactes sexuels incestueux et qui pourtant incestent leurs freĢres et/ou sÅurs et surtout cela empeĢche totalement de chercher au-delaĢ et de creuser ce qui dans les familles fabrique de lāinceste.
Il y a un vrai probleĢme dans lāapproche de lāinceste actuellement, cela aboutit aĢ des erreurs, des incompreĢhensions et des tentatives rateĢes de solutions apporteĢes.
Lāinceste nāest quasi exclusivement abordeĢ que par le sexuel, lāinceste est reĢsumeĢ aĢ : Ā« des violences sexuelles intra-familiales Ā», ce qui en soi ne veut pas dire grand-chose puisque cela va des actes dāinceste au viol conjugal, une fois de plus, lāon tente de comprendre un spectre aussi large que lāinceste par des qualifications juridiques, qui, si elles sont pertinentes (peut-eĢtre) dans un tribunal, sont loin, mais vraiment treĢs loin de pouvoir faire office de deĢfinition la plus large possible.
Des deĢfinitions trop cadreĢes qui sont aussi treĢs loin de nos reĢaliteĢs de victime et anciennes victimes.
Cet abord de lāinceste par le sexuel eĢvacue eĢgalement totalement nos dynamiques familiales, les violences physiques parfois et psychiques systeĢmatiques, on ne va pas dire, qui accompagnent les actes dāinceste, car ces violences nāexistent pas en paralleĢle, elles ne sont pas concomitantes, elles en sont lāessence, le terreau fertile qui va permettre dāaboutir aĢ des actes sexuels incestueux.
Mais le sexuel est tellement omnipreĢsent dans les reĢflexions sur lāinceste que cela obliteĢre compleĢtement le vrai sujet de lāinceste : comment dans une famille peut-on en arriver aĢ incester ses enfants ou les enfants quāon eĢleĢve, comment peut-on en arriver aĢ incester sa sÅur/son freĢre, sa nieĢce, comment peut-on, dans une famille, voir, savoir ou pressentir que cela arrive et eĢtre complice, par complaisance, plaisir, honte ou confort ?
Quelles sont les dynamiques qui font fonctionner ces familles sur plusieurs geĢneĢrations ?
Quels outils sont aĢ lāÅuvre pour silencier aussi fortement et aussi longtemps, non seulement les enfants incesteĢs, mais lāentieĢreteĢ de la famille et de lāentourage.
Comment les violences, quāelles soient physiques ou psychiques ne sont-elles pas releveĢes, par lāentourage, et toutes les personnes qui entourent ces familles : meĢdecins, professeurs, amis, bref socieĢteĢ.
Et comme lāinceste nāest abordeĢ que par cet aspect sexuel, et que ce sexuel est consideĢreĢ comme treĢs traumatisant, alors on ne comprend pas pourquoi ces foutues victimes ne parlent pas.
Ce serait si simple nāest-ce pas, si deĢs le premier acte sexuel commis, elles courraient dāun adulte indiffeĢrent aĢ un autre jusquāaĢ trouver Ā« la ou le sauveur Ā».
Pourquoi ne parlent-elles pas, pourquoi restent-elles totalement bloqueĢes, aĢ Ā« proteĢger leur agresseur Ā», pourquoi ne pas deĢnoncer cet oncle, pourquoi ne pas dire ?
Quāest ce qui empeĢche, quāest ce qui geĢne, ce serait tellement simple si elles parlaient.
Mais voilaĢ, rien nāest simple dans lāinceste, que ce soit le fonctionnement de la famille ou le fonctionnement propre de la victime qui survie dans cet environnement.
Ć mon sens, au lieu de se poser la question du Ā« pourquoi elles ne parlent pas Ā», ce qui aboutit aĢ des demi-veĢriteĢs, la question serait plutoĢt de sāinterroger sur ce que vous ne comprenez pas de lāinceste, de ce que vous ne voyez pas de lāinceste, et qui empeĢche les victimes de parler, non ce nāest pas que la honte, pas que la culpabiliteĢ, pas que les menaces, quand il y en a.
Et je le comprends, vous voudriez trouver la clef de voute de cet eĢdifice de silence afin de pouvoir le faire sāeffondrer, mais, filons la meĢtaphore, nos silences sont des catheĢdrales, pas le portail branlant dāune petite eĢglise de campagne.
Vous cherchez des raisons simples, elles sont complexes, et mises en place au berceau.
Et pour parler, il faudrait se reconnaitre, comprendre et savoir de quoi ces adultes parlent. A totalement effacer lāinceste dans les fratries, (1 demi-page sur un rapport de 750, je vous le rappelle) aĢ minimiser lāinceste entre enfants, Ā« cāest du touche-pipi, cāest de la deĢcouverte cāest normal Ā» ok...
Cela dure combien dāanneĢes la deĢcouverte et le touche pipi ? Parce que personnellement, pour moi les actes dāinceste ont dureĢ 10 ans, 10 ans cela repreĢsente toute lāenfance, et lāincestuel ne sāest reĢellement arreĢteĢ quāĆ la mort de mon peĢre et la rupture des liens avec ma meĢre, cāest un peu longuet, surtout vers la fin.
Comment peut-on imaginer quāun enfant comprenne que ce quāil est en train de vivre est de lāinceste, que cāest grave, que cāest traumatisant, que cāest en train de le pulveĢriser ?
Et meĢme lorsquāon le sait, plus ou moins, parle-t-on ?
Et puis ce que lāon oublie souvent, cāest que nous avons nos vies dāenfant aĢ vivre, et des strateĢgies de survies qui sont probablement deĢjaĢ installeĢes.
La feneĢtre pour parler est toute petite, minuscule, les terreurs quāil faut surmonter sont incommensurables, tous les obstacles aĢ surmonter sont tellement eĢnormes quāil nāy a pas de mot pour les deĢcrire, tout cela est tellement deĢmesureĢ par rapport aĢ lāenfant qui les affronte et meĢme aĢ lāadulte, car lorsque vous vous reĢpandez en Ā« compliments Ā» aĢ notre sujet en louant notre courage et notre force, cāest parce que vous savez au fond de vous ce quāil en coute.
Et par quoi donc commencer quand il faudrait parler ? quoi deĢnoncer ? quelles violences ? quelles humiliations ?
Quand cela commence dans votre fratrie avec un freĢre aineĢ de seulement 3 ans de plus ? de quoi parle-t-on ? quāest-ce que lāon deĢnonce ? aĢ quel moment ?
Nāest-il pas deĢjaĢ trop tard quand les actes sexuels incestueux apparaissent ?
Et surtout, comment expliquer lāincestuel ? ce terreau empoisonneĢ de lāinceste qui va preĢparer lāenfant victime, preĢparer le silence, cette toile de fond, patiemment tisseĢe geĢneĢration apreĢs geĢneĢration, qui est pour nous, anciennes victimes, si difficile aĢ deĢtricoter.
Lāincestuel nāest pas simple aĢ expliquer, car cāest un encheveĢtrement de comportements familiaux, larges et nucleĢaires, et il est propre aĢ chaque famille.
PlutoĢt que de parler de culture de lāinceste, il faudrait parler de cultures familiales (de lāinceste). On ne retrouve pas neĢcessairement tous les comportements deĢleĢteĢres dans toutes les familles. Violences physiques, pas violences physiques, violences psychologiques systeĢmatiques oui, mais lesquelles et comment les identifier ?
Et pour pouvoir identifier ces comportements encore faut-il que les discours sur lāinceste nous laissent lāopportuniteĢ de le faire, que la socieĢteĢ nous offre les outils, tous les outils, pas les seuls les outils qui la rassurent.
Lorsque la lumieĢre nāest faite que sur le sexuel, comment se deĢfaire de ces ideĢes que lāon nous marteĢle.
Lorsque lāon est pris dans ces discours, ces diagnostics faits aĢ lāarracheĢ, ces slogans, ces cases eĢtriqueĢes dans lesquelles lāon essaie de nous faire rentrer toutes, finalement on ne nous eĢcoute pas. Lorsque lāon nous dit Ā« nous vous croyons Ā» cāest faux, vous nāeĢcoutez que la partie qui vous inteĢresse, que celle qui rentre dans le logiciel.
Et vous imposez Ā« du trauma Ā» formateĢ sur des veĢcus qui ne le sont pas.
Jāai treĢs mal veĢcu la peĢriode metoo, jāeĢtais mal tout le temps, je ne comprenais pas pourquoi. JāeĢtais si mal, jāavais lāimpression dāeĢtre submergeĢe, jusquāaĢ ce que je comprenne pourquoi, je ne vivais pas Ā« mes traumas Ā» aĢ moi, de mes veĢcus, je vivais celui des autres, totalement inadapteĢ, et cāeĢtait marteleĢ, encore, encore et encore, tous les jours.
Tous les jours je lisais le trauma des autres, on māimposait des mots aĢ avoir, des ressentis, on pensait aĢ ma place, et on Ā« māobligeait Ā» par la reĢpeĢtition aĢ adheĢrer aĢ tout cela. Ce qui māa sorti de cet enfer, cāest un texte, un petit paragraphe, qui dāailleurs faisait hurler tout twitter et qui moi māa tireĢ de ce gouffre, parce quāil deĢcrivait exactement ce que jāavais veĢcu, et comment je le vivais aĢ lāeĢpoque, un petit paragraphe, eĢcrit au conditionnel, qui expliquait comment certaines victimes pouvaient vivre ces traumas au moment de lāenfance.
Et la LumieĢre est revenue, le temps de la lecture, en une minute. Jāai cesseĢ de faire miens les traumas des autres, jāai cesseĢ dāemployer les mots des autres pour utiliser les miens, et paver ma route.
Comment sortir du tout sexuel de lāinceste pour commencer aĢ sāattaquer aĢ ce qui a pu amener aĢ tout cela.
Et jāavoue que cela me met dans une grande coleĢre, enfant, nos familles nous privent de notre agentiviteĢ, et la socieĢteĢ continue de nous en priver en ne sāinteĢressant quāaĢ la surface et en nous imposant ses discours comme une veĢriteĢ reĢveĢleĢe, elle ne sāinteĢresse quāau sexuel parce cāest le plus accessible, le plus facilement compreĢhensible, oserais-je dire que face aĢ lāinceste la socieĢteĢ est faineĢante ?
Oui, non seulement je vais oser mais je le pense franchement.
Jāai duĢ reĢfleĢchir aux speĢcificiteĢs de lāinceste dans les fratries, et notamment entre enfants, et ce nāest pas simple (encore une fois).
D'abord parce que lāinceste adelphique, lāon nāen parle pas du tout, jamais, lorsquāil se deĢroule entre enfants, encore moins.
Jāai chercheĢ pendant une dizaine dāanneĢes, un article, un teĢmoignage, un entrefilet, enfin quelque chose, un bout de phrase, et rien, un teĢmoignage trainait sur internet, qui ressemblait treĢs eĢtrangement aĢ mon histoire, mais cāest tout, juste quelques faits, un teĢmoignage court, puis un petit paragraphe dans un article, avec quelques bribes dāexplications, trop courtes, trop frustrantes.
Sur les reĢseaux, alors que commencĢ§aient aĢ eĢclore des discours sur la peĢdocriminaliteĢ et sur lāinceste, on y parlait dāamneĢsie (je nāeĢtais pas amneĢsique), on y parlait des peĢres (je nāavais pas eĢteĢ incesteĢe par mon peĢre), sur le reste rien, quelques allusions sibyllines, de temps aĢ autre, Ā« le freĢre aussi Ā», et aucun discours sur les enfants agresseurs.
Alors quāavais-je veĢcu moi ? moi qui me souvenais de tout, moi qui ai eĢteĢ incesteĢ par un enfant de trois ans mon aineĢ (moi vers 4 ans et meĢme peut eĢtre avant, donc mon frĆØre aĢ 7 ans), moi dont les parents (ou tout du moins ma meĢre, pensais-je) eĢtaient au courant, moi qui nāai connu que cela dans mon enfance, puisque dāaussi loin que je peux me rappeler, lāinceste a toujours existeĢ.
Pas de choc de lāinceste qui surgit, pas cette fameuse sideĢration, la dissociation, je ne comprenais meĢme pas de quoi il eĢtait vraiment question (cāest si mal expliqueĢ), pas de peur de mourir, non.
De lāinceste, cĢ§a jāen eĢtais sure, les maltraitances de lāincestuel aussi (que je nāavais pas mis en mot, ni reĢfleĢchi), jāeĢtais une petite fille qui nāeĢtait pas heureuse, cĢ§a oui, puisque je māen faisais la reĢflexion, Ā« je ne suis pas heureuse et ce nāest pas normal de nāeĢtre pas heureuse quand on a 8/10/12 ans Ā», surtout quand vos parents vous serinent que vous avez tout pour lāeĢtre et que vous avez VRAIMENT de la chance dāavoir des parents qui sāoccupent si bien de vous (ah ? bon, bon !)
Mais aĢ part ces certitudes sur ce que jāavais veĢcu, aucune explication, aucune existence, mon inceste aĢ moi nāexistait pas, et pourtant jāeĢtais bien laĢ, avec mes souvenirs, certains douloureux, pas forceĢment ceux que lāon croit dāailleurs, jāeĢtais laĢ et je ne me reconnaissais dans rien.
Au cours de ces peĢreĢgrinations sur les internets, aĢ la recherche dāune leĢgitimation dāexistence, jāai trouveĢ UN ouvrage[2], le seul, je me suis jeteĢe dessus, je lāai ouvert, lu trois phrases, refermeĢ, reĢouvert et ainsi de suite, parce que cāeĢtait compliqueĢ, et difficile de faire face aĢ soi, seule.
Puis jāai fini par le lire, soulageĢe, meĢme si cāeĢtait douloureux, de lire que jāexistais, que ce que jāavais veĢcu existait, que cāeĢtait grave, mal consideĢreĢ et pas eĢtudieĢ.
Jāexistais, lāinceste dans les fratries existait et lāinceste entre enfants existait, ce nāeĢtait pas moi qui Ā« en faisais des caisses pour pas grand-chose Ā»
Plus tardivement, lorsque jāai commenceĢ aĢ māinteĢresser aĢ tout ce qui faisait lāinceste en dehors de ces sacro-saints abus sexuels, ce sont dans des teĢmoignages dāanciennes victimes de sectes que je me suis le plus retrouveĢe.
Les dynamiques sectaires ont des accointances quasi geĢmellaires avec les fonctionnements de nos familles incestuelles.
Bien que lāon ne puisse pas aĢ proprement parler Ā« dāemprise Ā» des enfants dans une famille incestueuse, puisque notre eĢtat meĢme dāenfant nous rend totalement deĢpendants de nos familles, au moins nucleĢaires, mais les meĢcanismes de controĢle, et dāannihilation de lāindividu sont les meĢmes.
Je vous mets la transcription des propos de Jean-Pierre Jougla, avocat, Ć propos des sectes dans le podcast de Fabrice Drouelle "Affaires sensibles" : Ā« Waco, une secte dans lāenfer des flammes Ā» du 4 mai 2016[3] et si je mets cet extrait, cāest que tous les propos qui sont ici tenus, et qui parlent des sectes sont applicables dans les familles incestuelles :
Ā« Cela peut aller jusqu'aĢ la soumission sexuelle, mais ce n'est pas la pire des soumissions, c'est cette atteinte permanente aĢ la digniteĢ de la personne qui fait que chaque adepte va perdre l'autonomie qui fait de nous des citoyens. [...]
Il y a des groupes dans lesquels il n'y a jamais de probleĢmes sexuels, l'abus sexuel c'est peut- eĢtre le bout de la lorgnette par lequel judiciairement on va repeĢrer des groupes sectaires, parce que c'est plus facile de comprendre ce qu'est un abus sexuel que comprendre ce qu'est un abus de digniteĢ de la personne.
Mais lorsqu'on recĢ§oit d'anciens adeptes de sectes, des victimes de sectes, l'essentiel de leurs traumatismes tourne autour de cette ideĢe que pendant des anneĢes, on les a priveĢs de ce qui faisait leur autonomie, ce qui faisait leur personnaliteĢ, le vrai traumatisme il est laĢ, parfois cela vient se meĢlanger avec des abus sexuels ou des abus financiers, mais ce sont deux avatars du pouvoir et de l'abus de pouvoir.
Et l'histoire nous montre que toujours le pouvoir absolu s'est accompagneĢ de deĢrapages de ce style-laĢ.[...]
AĢ condition que lāon aborde la secte, non pas simplement sous lāangle psychologique du rapport de soumission entre le gourou et les adeptes mais eĢgalement sur le plan de lāanalyse structurelle, voir comment le groupe fonctionne, en reĢaliteĢ, tout groupe sectaire, meĢme le plus ridicule, le plus petit, a toujours comme ambition dāexercer un pouvoir politique aĢ lāinteĢrieur du microgroupe quāil constitue. Et ce pouvoir politique va se deĢcliner, selon les trois pouvoirs que lāon connait habituellement, un pouvoir leĢgislatif : un pouvoir normatif, un pouvoir exeĢcutif : cāest-aĢ-dire lāapplication de toutes ces normes, et le pouvoir judiciaire : cāest-aĢ-dire la sanction de tout deĢrapage par rapport aĢ la norme poseĢe.
Ce qui fait la diffeĢrence entre un eĢtat deĢmocratique et un groupe sectaire aĢ ce niveau-laĢ, cāest justement parce que le gourou cumule ces trois pouvoirs entre ses seules mains quāil est tout puissant et donc leĢgitime aux yeux de ses adeptes, alors que dans nos socieĢteĢs, il faut quāil y ait une seĢparation obligatoire des pouvoirs de manieĢre aĢ ce quāil ait des contre-pouvoirs pour eĢviter que lāon soit en face dāun pouvoir absolu. [...]
Le groupe sectaire renvoie beaucoup plus aĢ cette dimension totalitaire politique quāa cette dimension religieuse qui ne lui sert la plupart du temps que de masque et de faux nez. Ā»
Nos incesteurs, que je vais deĢlier de nos agresseurs, ā parce que chez moi, comme dans dāautres nombreuses familles, lāincesteur : celui qui a mis en place la meĢcanique incestuelle de la famille, cāeĢtait mon peĢre, et ce nāeĢtait pas lāagresseur (concernant les abus sexuels en tout cas) ā sont les gourous de la secte-famille, et pour reprendre les termes de Jean-Pierre Jougla, ils mettent en place les normes familiales, ils veillent aĢ lāapplication de toutes ces normes et ils sanctionnent les deĢrapages : les deĢrapages ce sont nos paroles, nos actes de reĢbellion contre les abus de pouvoir, tout ce qui peut ressortir aĢ travers nous de lāintimiteĢ familiale, mettant ainsi en danger le systeĢme.
Cāest dāailleurs un danger fantasmeĢ par lāincesteur, parce quāen veĢriteĢ, qui empeĢche nos familles ne nous maltraiter ?
Cet eĢclairage, je pense, nous permet de mieux comprendre la mĆ©canique Ć l'oeuvre et les compliciteĢs environnantes.
Je ne me fourvoierais en revanche pas dans un calquage aĢ lāidentique de lāemprise-soumission des gourous avec leur adeptes, car je ne voudrais pas que lāon sāimagine que tout lāentourage dāun incesteur est sous emprise.
Et que la famille (et notamment nos meĢres) serait soumise parce que sous emprise du systeĢme sectaire incestueux.
Parfois nos mĆØres participent, passivement ou activement, elles sont meĢmes parfois les incesteuses et les agresseuses.
Ce que je souhaite preĢciser par laĢ, cāest que faire des meĢres lorsquāelles ne sont pas les agresseuses, des victimes du systeĢme au meĢme titre que les victimes dāinceste elles-meĢmes est un raccourci un peu facile, et qui, meĢme sāil peut eĢtre vrai, dans le cadre par exemple de violences conjugales, ce nāest pas en geĢneĢralisant cela que nous comprendrions mieux les dynamiques de l'inceste.
Nous sommes tous les rouages du systeĢme incestuel, meĢme nous victimes, nous sommes un rouage, ce qui ne signifie pas que nous soyons responsables, complices ou coupables, nous sommes un rouage du systeĢme qui nous broie. Voyez comme tout est compliqueĢ, et comme nous ne pourrons jamais faire lāeĢconomie de la complexiteĢ concernant lāinceste.
Il faut se rappeler comme je lāai mentionneĢ plus haut, que les systeĢmes incestueux sont transgeĢneĢrationnels, que ce nāest donc pas que lāincesteur met sous emprise la famille au sens large. Il est lui-meĢme issu de ce systeĢme (rouage), et dāailleurs plutoĢt que dire quāil met en place une dynamique incestuelle, en fait il faudrait dire qu'il la peĢrennise.
Je reprends mon exemple pour eĢtre plus claire :
Lāinceste vient de ma famille paternelle, toutes les interactions eĢrotiseĢes, les gestes et propos deĢplaceĢs, quand il ne sāagissait pas carreĢment dāagressions sexuelles, et bien suĢr des actes sexuels incestueux de mon freĢre, viennent de ma famille paternelle, et elles se situaient dans toutes les strates familiales : 2 oncles/tous mes cousins/mes parents (oui peĢre ET meĢre) /mon freĢre.
De ma famille maternelle : rien, on ne les freĢquentait dāailleurs que treĢs peu sans aucune raison autre quāils nāeĢtaient pas ma famille paternelle, ils eĢtaient par conseĢquent infreĢquentables.
On ne peut alors pas dire que mon peĢre a Ā« mis en place Ā» un systeĢme qui le servirait, meĢme si factuellement cāest une reĢaliteĢ, il a fait perdurer notre systeĢme familial deĢjaĢ en place depuis certainement plusieurs geĢneĢrations.
Et cela ne le deĢdouane en rien de ses responsabiliteĢs, il nāavait aucune excuse aĢ nous battre, aucune excuse aĢ prendre plaisir aĢ nous eĢcrabouiller mon freĢre et moi, et ma meĢre nāa aucune excuse aĢ avoir laisseĢ mon peĢre nous battre sans jamais sāy opposer dāaucune facĢ§on, aĢ part lui dire de faire attention...aĢ ne pas trop laisser de traces, oui parce nous avions friseĢ le signalement une fois, une instit de maternelle avait fait comprendre aĢ ma meĢre que la prochaine fois que jāarrivais avec lāeĢnorme trace de la main de mon peĢre sur la joue, ce serait signaleĢ, jāavais 3 ans, mon freĢre a eĢgalement recĢ§u sa premieĢre gifle aĢ 3 ans, parce quāil refusait de descendre du maneĢge, mon peĢre adorait Ā« raconter cette anecdote Ā».
Tout ceci raconteĢ, non pour provoquer une quelconque pitieĢ, mais pour montrer un peu, comment se met en place ce systeĢme deĢs le plus jeune aĢge.
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Ce quāil faut bien comprendre dans nos socieĢteĢs, et que lāon feint dāignorer (voire pour certains, on ne le toleĢre pas) cāest que les enfants y vivent, les enfants entendent ce qui sāy dit, par leurs parents, leur entourage, par les meĢdias, les reĢseaux sociaux (maintenant), bref, les enfants baignent dans les discours ambiants pour ne pas dire le discours dominant, mais si apreĢs tout disons-le.
Ils entendent ce qui est dit et aussi ce qui ne lāest pas, si lāon ne parle pas dāinceste dans les fratries, si lāon ne dit pas lāinceste entre enfants, si meĢme couramment on le minimise (rappelez-vous le fameux touche-pipi-tous-les-enfants-le-font-ce-nāest-pas-grave) que voulez-vous quāil se passe ?
Quand lāinceste fait tout autant partie de leurs enfances que le brossage de dent et les devoirs aĢ la maison, que voulez-vous que les enfants fassent et disent ?
Rien.
Je ne reviendrai pas sur les raisons du silence de lāinceste que jāai deĢjaĢ abordeĢ[4], mais sur Ā« les solutions Ā» qui sont proposeĢes afin que les enfants prennent conscience de la graviteĢ de ce quāils vivent et finissent par en parler.
Je souhaiterais parler des Ā« cours dāeĢducation sexuelle et affective Ā» et des fascicules et petites brochures pour enfants qui fleurissent un peu partout, et je ne parle meĢme pas des cours dāauto- deĢfense pour enfant.
Que lāon ne me fasse pas penser de travers, je suis pour les cours dāeĢducation sexuelle et affective aĢ lāeĢcole, parce quāils sont importants en eux-meĢmes et pour ce quāils sont, je suis pour que les enfants puissent dire et parler de leur agression eĢvidemment.
Seulement je suis contre le fait que lāon se permette dāappeler cela de la preĢ-vention, surtout quand il sāagit dāinceste.
Je suis contre le fait que lāon rende lāenfant responsable de sa propre protection, quāon lui apprenne aĢ eĢviter de subir des agressions, et quāon instille en lui une culpabiliteĢ sāil nāarrive pas aĢ les eĢviter.
Un enfant, on lui apprend aĢ regarder aĢ droite et aĢ gauche avant de traverser la rue, comme on lui apprend aĢ ne pas suivre les inconnus meĢme lorsquāils proposent des bonbons ou cherchent leur petit chien, en revanche, on nāapprend jamais aĢ un enfant comment esquiver les voitures au milieu dāune autoroute, jamais, nulle part, aĢ aucun moment.
Comment penser quāen situation dāagression ā agression qui ne ressemble jamais aĢ ce que vous imaginez ā un ou une enfant va eĢtre capable de mobiliser tous ses savoirs pour faire face seulĀ·e, si et seulement sāil lui eĢteĢ preĢsenteĢ un paysage exhaustif de toutes les situations dāagression, car il faut quāil/elle puisse lāidentifier.
Comment peut-on penser quāapprendre aĢ dire Ā« non Ā», meĢme treĢs fort, va arreĢter un agresseur (alors oui vous trouverez toujours quelques exemples pour qui cela a fonctionneĢ, quelques exemples face aĢ lāimmensiteĢ des agressions)
A lire ces fascicules et petites brochures, cela donne lāimpression que les enfants ne savent pas dire non (ils savent) et se laissent agresser par ignorance que Ā« leur corps cāest leur corps et que personne nāa le droit dāy toucher Ā», deĢjaĢ rien que cela est faux, puisque papa/maman/le meĢdecin, la maitresse eĢventuellement, une infirmieĢre, vont eĢtre ameneĢ aĢ le faire. Si les enfants ignoraient vraiment que ce quāils ont veĢcu pose un probleĢme, et dāailleurs dāabord aĢ eux, ils parleraient tout de suite, certains le font, mais treĢs peu.
Et jāai vraiment du mal avec ces techniques dāeĢvitement enseigneĢes, parce que si elles eĢchouent, je crains que lāenfant ne sāenfonce que plus dans le silence, puisquāaĢ la honte ressentie, sāajoutera la culpabiliteĢ de nāavoir pas su eĢviter lāagression alors quāon le lui avait enseigneĢ.
Parce quāun enfant nāest pas un adulte miniature, il ne reĢfleĢchira pas de manieĢre raisonneĢe sur son impuissance aĢ pouvoir se deĢfendre, il se dira quāil nāa pas dit non assez fort, quāil nāa pas couru assez vite, quāil nāa pas su repeĢrer lāagresseur, Ā« pourtant on le lui avait expliqueĢ Ā». Et il faut repenser eĢgalement notre manieĢre dāeĢduquer les enfants qui est beaucoup plus faite actuellement pour contenir et apprendre aux enfants aĢ obeĢir aux adultes quāaĢ leur faire front et dire non.
Bref, je māen voudrais dāeffrayer la terre entieĢre, mais la preĢ-vention ne se fait pas aupreĢs des victimes potentielles, mais des agresseurs et potentiels agresseurs.
Je vous rappelle que la Ā« preĢvention Ā» du style : ne mettez pas de jupe, ne buvez pas, faites attention, ne fonctionne pas avec des femmes adultes ā qui pourtant elles, ont une conscience plutoĢt bonne de ce qui pourrait advenir ā pour eĢviter les viols et les agressions, mais on imagine que cāest une bonne ideĢe de reprendre avec des enfants, des vieilles meĢthodes qui ont deĢjaĢ montreĢ leur inefficaciteĢ avec des adultes, ok...
Et alors concernant lāinceste...
LaĢ, autant dire que tout ce que vous dites, ce nāest pas que cĢ§a rentre par une oreille et ressort par lāautre, cāest que cela ne passera pas la barrieĢre du compartimentage dans une grande partie des cas (Oui encore une fois, pas tous etc.).
Parce que nous sommes eĢduqueĢs dans lāinceste, nous naissons dans lāinceste, lāinceste cāest ce qui fait tourner notre monde.
Je vous remets un extrait de Jean-Pierre Jougla :
"Et ce pouvoir politique va se deĢcliner, selon les trois pouvoirs que lāon connait habituellement, un pouvoir leĢgislatif : un pouvoir normatif, un pouvoir exeĢcutif : cāest-aĢ-dire lāapplication de toutes ces normes, et le pouvoir judiciaire : cāest-aĢ-dire la sanction de tout deĢrapage par rapport aĢ la norme poseĢe."
Qui met en place nos normes familiales ? qui les fait appliquer ? qui sanctionne ? nos incesteurs, notre famille, nos normes, qui ne sont pas vos normes sociales.
Ā« Il faut dire non Ā», sauf, que nous, nāavons pas le droit de dire non.
Et pourtant rebelle comme pas deux, jāai dit non des dizaines de fois, aĢ mon freĢre : aucune efficaciteĢ, et la seule fois ouĢ jāai dit stop aĢ mon peĢre, il a redoubleĢ les coups, et je savais quāil allait le faire, parce que la reĢbellion chez nous, eĢtait inacceptable.
Et ce nāest pas que nous nāallons pas comprendre ce qui est dit, nous allons juste compartimenter entre ce que qui se dit laĢ, aĢ lāeĢcole, ou laĢ dans cet atelier, et ce qui se passe aĢ la maison.
Ou bien, nous allons hausser les eĢpaules inteĢrieurement en sachant treĢs bien que tout ce qui se dit laĢ, cāest bien joli, mais ce nāest absolument pas applicable aĢ la maison.
Il faut cesser de penser lāinceste avec votre normaliteĢ, car nous sommes en dehors de vos normes.
Il faut penser lāinceste dans lāinceste.
Toute mon enfance, mon adolescence, jāavais treĢs conscience, mais de manieĢre confuse et deĢcousues eĢvidemment, des deĢfaillances et de la violence de ma famille, pas neĢcessairement en ce qui concernait les actes sexuels incestueux de mon freĢre dāailleurs, je ne me posais pas la question, je ne me māinterrogeais pas sur sa normaliteĢ ou son anormaliteĢ, parce mon freĢre lorsque nous eĢtions enfants, cāeĢtait aussi mon seul allieĢ dans les violences, jusquāaĢ ce que je nāaie plus dāallieĢ du tout.
Mais tout ce qui constituait lāincestuel, meĢme si je nāavais pas ce mot, ni sa compreĢhension, jāavais conscience dāun gros probleĢme, des violences de mon peĢre, mais aussi celles psychologiques de ma meĢre, de ses intrusions perpeĢtuelles dans mon intimiteĢ.
Mais tout ceci eĢtait treĢs treĢs cliveĢ, actes sexuels incestueux dāun coteĢ ā qui dāailleurs ne repreĢsentaient pas un probleĢme, cāeĢtait contraignant, mais cāest toutā dāun autre coĢteĢ il y avait les maltraitances, le controĢle continu de mon peĢre, la peur, la terreur, ce climat dāeĢpouvante dans lequel nous faisait vivre ma meĢre. Nous clivons, clivons, clivons pour survivre, on fait face aux probleĢmes individuellement quand ils se preĢsentent.
Jāavais conscience que ce que je vivais nāeĢtait pas normal dans le sens ou tout cela nāeĢtait pas juste et ouĢ jāavais le sentiment diffus et confus que ce nāeĢtait pas la vie.
Mais quelle eĢchappatoire ?
Avais-je meĢme envie dāeĢtre retireĢe aĢ ma famille ? La reĢponse est non, je pense meĢme que cette ideĢe māeĢtait insupportable aĢ certaines eĢpoques.
Est-ce que jāaimais mes parents ? jāadorais ma meĢre, mon peĢre me faisait peur en permanence et non je ne lāaimais pas du tout, il nāavait dāailleurs aucune marque dāaffection aĢ notre eĢgard, aucune.
Et vous savez pourquoi, rions un peu ensemble, il nāavait aucune espeĢce dāaffection aĢ notre eĢgard, il nāavait aucun geste tendre, ni vraiment de paroles gentilles parce que disait-il Ā« il ne voulait pas que plus tard, en ayant mal interpreĢteĢ des gestes, nous portions plainte contre lui, ma sÅur et moi pour inceste Ā»
Cocasse nāest-ce pas ?
Les liens familiaux de ma famille paternelle et donc aussi nucleĢaire eĢtaient treĢs puissants, on appartenait litteĢralement au clan, et comme cāeĢtait le seul valable vis-aĢ-vis du reste du monde, il nāy avait donc nulle part ouĢ aller.
Pour deĢsappartenir au clan il māa fallu changer de nom.
Ce qui sāapplique dans la socieĢteĢ cāest-aĢ-dire Ā« ne pas incester ses enfants, ou sa sÅur, ou sa nieĢce Ā» ne sāapplique pas aĢ la maison, puisque cāest preĢciseĢment ce que nous vivons, ne pas battre ses enfants, cāest aussi interdit et cāest aussi preĢciseĢment ce que certains dāentre nous vivent.
Or, que cāest interdit, nous le savons, nous ne sommes pas deĢconnecteĢs de la reĢaliteĢ, seulement nous clivons, la maison versus le monde exteĢrieur.
Parfois, comme chez moi, le monde exteĢrieur nāavait droit quāa treĢs peu dāincursion aĢ la maison, on ne rameĢne pas sa copine du colleĢge comme cĢ§a Ć l'improviste, pour gouter, on teĢleĢphone avant pour demander lāautorisation. Un coup de sonnette aĢ la porte si lāon nāattendait personne, eĢtait toujours consideĢreĢ comme intrusif, et malpoli.
Et le malotru, vertement critiqueĢ, une fois parti dāavoir eu lāoutrecuidance de sonner.
Ce sont des exemples, mais les intrusions sont autant de mises en danger du systeĢme familial, par principe, car reĢellement il nāy avait jamais danger aĢ ce que AmeĢlie ou Virginie vienne au gouter.
Mais il peut y avoir mise en danger de lāimage parfaite et insoupcĢ§onnable mise en place. Ā« Que vont dire les gens Ā», si mes parents estimaient que tout nāeĢtait pas comme ils lāavaient deĢcideĢ.
Et il fallait voir le cirque lorsque mes parents recevaient, habillĆ©s sur leur 31, parfumĆ©s, totalement guindĆ©s, la table dressĆ©e dans la salle Ć manger (fait peu ordinaire car nous mangions dans la cuisine) nous eĢtions preĢsenteĢs comme de gentils animaux de compagnie aĢ lāapeĢritif, nous avions eu le brief avant Ā« vous vous comportez bien Ā», ce qui signifiait : vous dites bonjour, vous reĢpondez si lāon vous pose des questions, sinon silence, pas trop bouger, pas se jeter sur les biscuits apeĢros, faire passer les ramequins, deĢbarrasser et aĢ la fin de lāapeĢro, mon peĢre sifflait la fin de la reĢcreĢ, tout le monde dans les chambres. Nous avions joueĢ notre roĢle de famille unie avec des enfants bien eĢleveĢs, mes parents recueillaient les compliments, rideau pour les enfants.
Tout eĢtait treĢs ritualiseĢ, je ne vais pas dire que cāeĢtait une horreur, jāaimais bien, cela sortait du quotidien, on chipait les fins de plat aĢ la cuisine, on y eĢchangeait trois mots avec ma meĢre, cāeĢtait marrant parce que cāeĢtait diffeĢrent, nous nāexistions pas mais cela nāavait pas tellement dāimportance.
Dans une famille comme la mienne, mieux vaut exister moins que trop.
Dāailleurs, cāest toute notre vie qui eĢtait ritualiseĢe, cadreĢe, encadreĢe, organiseĢe, il nāy avait aucune place pour lāimprovisation, lāinvention, la spontaneĢiteĢ.
Les vacances dāeĢteĢ se deĢroulaient toujours de la meĢme manieĢre, 15 jours en camping, dans un camping 5 eĢtoiles pour quāil y ait un minimum de francĢ§ais et que lāon nāait pas aĢ socialiser, mon peĢre deĢtestait cela, 15 jours chez ma grand-meĢre, 15 jours dans une location perdu au fin fond dāune reĢgion isoleĢe.
Tous les deĢparts en vacances eĢtait facteur de stress pour mon peĢre, donc nous en faisions les frais, nous eĢtions copieusement engueuleĢs, il fallait partir pile aĢ lāheure, faire des pauses en voiture Ā« utiles Ā» et les plus courtes possibles.
Nous tenir sage en voiture sur des trajets interminables, nous ne lāeĢtions eĢvidemment pas, donc gifles et menaces dāabandon sur le bord de la route.
Et les vacances pouvaient commencer une fois quāune immontable tente eĢtait enfin tendue aĢ coup dāengueulades et dāinsultes.
Cela tous les ans, immanquablement, jusquāaĢ ce que mes parents acheĢtent la Ā« maison de campagne Ā» ouĢ nous allions passer, toutes les vacances, tous les week-end, de feĢvrier aĢ novembre.
Lāennui y eĢtait mortel.
La vie aĢ la maison eĢtait de toute facĢ§on morne et chiante pour des enfants, puisque rien nāeĢtait organiseĢ ni fait pour nous, nous devions nous adapter et suivre.
UNE FOIS, UN eĢteĢ jāai eĢteĢ inviteĢ aĢ passer 15 jours seule en famille, mais cāeĢtait lāautre famille, mon oncle a eu gain de cause apreĢs 3 jours de neĢgociation avec mon peĢre.
Mon peĢre ne comprenait pas (il ne voulait pas surtout) que nous puissions vouloir eĢtre ailleurs quāen famille, et puis bon, loin des yeux, loin du controĢle paternel, cĢ§a ne pouvait que lui deĢplaire.
Je nāavais de toute facĢ§on aucune sortie de secours, dans une petite ville ou mes parents eĢtaient lāune enseignante, lāautre lāeĢquivalent de CPE. (EĢcoles priveĢes)
Jāai commenceĢ ma scolariteĢ dans lāeĢcole attenante au lyceĢe ou travaillait mon peĢre, il y connaissait bien suĢr tous les enseignants, et bien suĢr mon institutrice de CP qui... frappait les eĢleĢves (oui cela existait encore), mais cela ne deĢrangeait pas du tout mon peĢre.
En changeant dāeĢcole mon peĢre avait deĢcreĢteĢ quāil me fallait de lāautoriteĢ (traduire ici : de lāautoritarisme, de la rigueur, et une pression sans relaĢche) pour avoir de bons reĢsultats scolaires (son obsession), ce que je nāavais pas, sans eĢtre une cancre, jāeĢtais une eĢleĢve treĢs moyenne, ce qui bien suĢr, redoublait les violences, les privations, les punitions, les humiliations, les insultes, les menaces.
JāeĢtais de toute facĢ§on consideĢreĢe par mes parents comme Ā« gentille Ā» mais pas futfut.
Tout ceci, jusquāau colleĢge ouĢ travaillait ma meĢre, et lyceĢe, mes deux parents.
Lāenfermement fut alors total, le controĢle au-delaĢ du toleĢrable.
Chez moi cāeĢtait un peu extreĢme donc je me garde de trop geĢneĢraliser mon cas.
Mais il y a des principes communs et des fils communs aĢ tirer.
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Maintenant, que faire de lāinceste dans les fratries et de lāinceste entre enfants, dans un systeĢme quasiment uniquement forgeĢ sur une reĢponse reĢpressive des institutions face aĢ lāinceste. ConsideĢrant que ce qui est punissable et donc puni est uniquement : les abus sexuels, et que la reĢponse aĢ ces abus est judiciaire.
Mon intime conviction, hormis quāassocier sexe et enfance creĢe le malaise, cāest que lāon ne sait pas trop quoi faire de ces incestes entre enfants, de meĢme que les agressions sexuelles entre enfants mais je nāaime pas trop meĢlanger lāinceste avec ce qui nāen est pas, car en geĢneĢral lāinceste disparait treĢs vite de la reĢflexion, car lāinceste pour de multiples et individuelles raisons, creĢe eĢgalement le malaise, donc on lāeĢvacue facilement, ceci sāexpliquant par le fait quāil est plus facile de qualifier de monstre quelquāun qui ne fait pas partie des siens, plus facile de lāalteĢriser et de lāostraciser, Ā« plus facile Ā» ne voulant pas dire Ā« facile Ā». Et je preĢcise que je ne hieĢrarchise rien, ce nāest pas que jāestime que lāinceste serait plus ou moins grave que la peĢdocriminaliteĢ, nāayant veĢcu que de lāinceste je me garderais bien de ce genre dāeĢgarement, mais ce sont des dynamiques diffeĢrentes tout simplement, et je souhaite que lāinceste soit traiteĢ en tant que tel et non comme un sous genre de la peĢdocriminaliteĢ qui serait intrafamiliale.
Au fur et aĢ mesure, ces dernieĢres anneĢes, que la peĢdocriminaliteĢ et lāinceste commencĢ§aient aĢ effleurer la conscience endormie de la socieĢteĢ, on a assisteĢ aĢ une espeĢce de purification des enfants (victimes dāabord) pour mieux deĢmoniser les agresseurs.
Et meĢme si lāintention eĢtait louable : celle de prendre enfin la deĢfense des enfants victimes dāabus sexuels, et de consideĢrer les preĢjudices, cela a abouti aĢ une purification de lāenfance dans son ensemble, et cela ne permet plus de consideĢrer lāinceste entre enfants.
Si les enfants sont pures et sans taĢche et que la sexualiteĢ nāest pas un sujet, comment un enfant de 7/8 ans peut incester sa petite sÅur de 5 ans, impossible.
Ou alors si cela arrive, cāest quāil a eĢteĢ perverti par un vilain adulte qui lui aura montreĢ ou fait des choses.
Possible oui, mais en attendant le sait-on ? En parle-t-on ? est-ce eĢtudieĢ meĢme ?
Et pourtant, cela arrive, des freĢres et des sÅurs incestent leurs freĢres et/ou sÅurs. Le rapport CIIVISE propose le chiffre de 19% de lāinceste, qui serait du fait des frĆØres, meĢme si ce chiffre nāa de valeur que consultative, si l'on sait que cela existe, parce quāil y a quelques allusions qui surgissent parfois, lāon a en revanche aucune reĢponse aĢ apporter.
Aucune reĢponse aĢ nous apporter en tant que victime, et aucune reĢponse aĢ apporter aĢ ce genre de situation, autant peĢnale ā et heureusement, on ne va pas rouvrir La petite roquette, Dieu nous en preĢserve ā que sociale.
Car si lāon sait quoi faire des victimes dāinceste : les soigner. (Mais jusquāaĢ quand allons-nous continuer dāeĢponger lāeau par terre sans reĢparer la fuite ?)
Que fait-on des enfants agresseurs ? et comment geĢre-t-on ces situations ?
En imaginant que ces incestes soient deĢtecteĢs ? Quelles reĢponses, quels parcours de soin ? Quelles proceĢdures pour la prise en charge de lāenfant agresseur ? De la famille au complet ?
Et jāai bien lāimpression que pour le moment, la seule reĢponse apporteĢe, cāest de faire comme si nos incestes nāexistaient pas.
Mais cāest aĢ cet endroit preĢciseĢment que je vous renvoie vos responsabiliteĢs, parce que lāinceste dans les fratries et notamment entre enfants existe, et vous devez cesser de nous ignorer. Parce que nous victimes dāinceste dans nos fratries, nous nāen pouvons plus dāentendre quāil faut parler, que parler serait la clef et la solution du probleĢme, alors que dans le meĢme temps, vous oubliez systeĢmatiquement nos incestes, vous ignorez systeĢmatiquement nos incestes, et surtout, vous, vous nāen parlez jamais.
AĢ lāheure actuelle, nous sommes toujours les victimes dāincestes qui nāexistent pas.
Sources
[1] Le rapport public de la CIIVISE
[2] Quand toucher n'est plus jouer : Inceste freĢre/sÅur et abus sexuels entre enfants, Anne Schwartzweber, 5 janvier 2017
[3] Fabrice Drouelle : Affaires sensibles : Ā« Waco, une secte dans lāenfer des flammes Ā» du 4 mai 2016
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/aGaires-sensibles/waco-une-secte-dans-l-enfer-des-flammes-Ā 9833854
[4] Du silence de lāinceste aĢ la silenciation, Carabinacitron, 8 octobre 2023
https://www.crimscollectif.com/carabinacitron/du-silence-de-l'inceste-a-la-silenciation